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Jativa

Comme Carcagente, Jativa est située dans la province de Valence. Il m'est impossible, en l'évoquant, de ne pas me rappeler son style, arabe, comme son nom, la belle vallée dans laquelle elle a été construite il y a bien longtemps, son climat merveilleux, et le bleu intense de son ciel éclatant. Avec quelques camarades de l'endroit je suis allé visiter les ruines encore debout et pétries d'histoire d'un grand château maure au long du sommet de confines flanquant la ville, où des mimosas magnifiques poussaient à profusion entre les pierres disjointes. De cette hauteur on contemplait un paysage de rêve qui s'étendait devant nous avec, d'abord, des cultures diverses, puis d'immenses orangeraies dont les fruits d'or pendaient, comme en cascades, le long des branches qui ployaient sous leur poids, et qu'encadraient des feuillages vernissés de vert, qui rutilaient au soleil.

La fondation de la Collectivité de Jativa n'a pas été aussi rapide que celle de Carcagente, qui n'est pourtant pas bien loin. Pourtant, le mouvement social y était aussi très vieux, et nous y avions toujours compté de bons militants. Des 17.000 habitants, 3.000 adhéraient à la C.N.T. L'agriculture dominait et l'industrie, beaucoup moins importante, se rattachait surtout à la production d'oranges et aux travaux en dérivant, à la production de riz, préparé et moulu sur place, à celle d'olives, transformées en huile dans les moulins locaux.

L'attaque fasciste avait réuni toutes les fractions de gauche qui, comme dans tant d'endroits, convergèrent au Conseil municipal. Bientôt, celui-ci compta, selon l'importance numérique des forces représentées, cinq représentants de la C.N.T., cinq de l'U.G.T., un socialiste, un communiste, un républicain de gauche et un membre du parti autonomiste valencien.

Et bien que l'industrie fût dérivée de l'agriculture, c'est par elle que la socialisation commença. Elle ne fut pas généralisée dans toutes les professions, et en janvier 1937, les coiffeurs se disposaient, parmi les derniers, à collectiviser, avec leurs patrons, les boutiques qu'ils s'étaient, jusqu'alors, limités à contrôler.

Dans le domaine industriel, la structure et le mécanisme fonctionnels sont ceux que nous avons déjà vus : sections techniques d'organisation, sections administratives , les Syndicats dirigent les activités des ateliers où les ouvriers élisent les comités chargés de la direction sur le terrain même du travail.

Mais la Collectivité agraire, née le 16 janvier 1937, trois semaines après mon premier passage, me semble plus importante, car elle démarrait avec un tel élan, que j'en ai gardé comme un éblouissement. Il y avait à cela une raison fondamentale qui nous explique bien des cas semblables que nous avons eu l'occasion d'observer : le plus grand nombre des membres de la C.N.T. étaient des paysans, durs à la tâche, habitués au travail responsable, à la création directe, tandis que dans la section locale de l'U.G.T. prédominaient les employés d'administration publique et privée, nombre de commerçants, et la partie conservatrice des petits exploitants dont la centrale socialo-réformiste faisait profession de foi incessante de défendre la propriété traditionnelle de la terre.

Cela était en contradiction avec les postulats essentiels du marxisme, avec les vues de Marx et Engels, mais le marxisme des socialistes espagnols était tout aussi anémié que celui des socialistes français. Et Marx et Engels et leurs continuateurs ont dit tant de choses contradictoires !

Nos camarades ne prétendaient pourtant pas enlever de force les biens de personne - à moins qu'il ne s'agît de fascistes, de "terratenientes" ou de caciques ; et sauf quelques cas isolés que nous admettons par hypothèse, on ne peut leur faire ce grief. Au contraire, on est surpris de voir combien grande a été, dans l'ensemble, leur tolérance vis-à-vis des "individualistes".

La naissance en force de la Collectivité agraire s'explique aussi pour d'autres raisons, compléments de celle que nous venons d'exposer. Avant les événements, les libertaires de l'endroit exerçaient une influence constructive sur de nombreux paysans groupés dans une Société mutuelliste locale. Et c'est maintenant le noyau actif, organisateur et dynamique de cette Société d'entraide, qui constitue l'élément de base du microcosme social en formation. Il est bien difficile de s'improviser organisateur, et très souvent on trouve dans les antécédents de cette révolution, une activité pratique qui explique la sûreté de l'essor et la rapidité de la réussite.

En outre, Jativa offre d'autres traits remarquables de conscience sociale. Tel le cas de ce propriétaire d'un moulin à huile - une fortune à l'échelle locale - qui donna spontanément son capital de travail et ses terres à la Collectivité. Tel celui de son fils, lui aussi privilégié, qui apporta tout son argent et celui de sa femme. Et encore celui du secrétaire (1) qui en fit autant. On ne se surprendra donc pas de l'optimisme idéaliste qui se lisait dans les regards, dans les gestes, dans l'allure, presque dans la démarche de ceux qui s'affairaient à créer un monde nouveau, allant et venant sans cesse pour les multiples tâches dont ils avaient la charge.

Cet esprit apparaît dans le Règlement rédigé, après de nombreuses délibérations, et édité sur un petit carnet blanc que je conserve toujours avec un soin religieux. En voici les articles qui me semblent les plus caractéristiques :

" Art. 1. - La Collectivisation sera l'œuvre des paysans, métayers et petits propriétaires, qui adhéreront volontairement et seront agréés par l'assemblée générale.

Art. 3. - Quand la terre d'un petit propriétaire se trouvera au milieu de terres collectivisées, constituant ainsi un obstacle pour la Collectivité, on l'échangera pour une autre, de meilleure qualité et plus avantageuse pour celui qui sera obligé de se déplacer.

Art. 5. - Les veuves n'ayant pas d'autres moyens d'existence que la terre pourront, si elles le veulent, faire partie de la Collectivité.

Art. 10. - La défense de notre production et l'administration des cultures seront assurées par les commissions suivantes :

a) Statistiques ; b) Irrigation ; c) Engrais, semences et cultures nouvelles ; d) Maladies des plantes, désinfection et fumigations ; e) Economat, achats et prix de vente ; f) Bétail, aviculture et apiculture ; g) Outillage et machines ; i) Analyses ; i) Aliments du bétail ; k) Moyens de transport de la Collectivité ; l) Production et direction technique appropriée ; m) Travailleurs de la terre.

Art. 15. - En, cas de maladie, les membres de la Collectivité ou leur famille seront soignés pour le compte de la Collectivité, qui assumera tous les frais.

Art. 16. - Le loyer des demeures privées habitées par les membres de la Collectivité sera payé par celle-ci, indépendamment du salaire (2).

Art. 17. - Les meubles des nouveaux ménages seront payés par la Collectivité si les bénéficiaires en sont membres depuis au moins six mois, et s'ils se conduisent comme de véritables collectivistes.

Art. 21. - Les enfants ne seront pas admis au travail avant l'âge de quatorze ans ; ils seront obligés d'aller à l'école dès l'âge de six ans. Les parents ou les tuteurs seront responsables de leur assistance scolaire ; toute absence injustifiée des enfants sera punie d'une réduction de six pesetas sur le salaire des parents.

Art. 22. - La Collectivité aidera, pour qu'ils puissent suivre des études supérieures, pour le bien de l'humanité, les enfants les plus doués. Les frais seront couverts par la Collectivité.

Art. 28. - Quand la Collectivité aura à se plaindre du comportement d'un de ses membres, elle le rappellera à l'ordre jusqu'à deux fois. La troisième fois, il sera expulsé sans aucun droit d'indemnisation. L'assemblée générale statuera sur ces cas."

On établit le salaire familial. Un homme seul touchera 35 pesetas par semaine, une femme seule exactement la moitié (3). Chaque enfant à charge donne droit à sept pesetas de plus par semaine ; puis, de 10 à 14 ans, à 10,50 pesetas, pour les garçons et à 8,75 pour les filles.

On oublie bien peu des questions essentielles, si l'on oublie vraiment quelque chose que l'expérience se chargera de révéler, car rien n'empêche de modifier les statuts établis, et de les améliorer. Ajoutons que non seulement l'instruction sera obligatoire, mais elle sera donnée dans les écoles de la Collectivité qui a déjà ses maîtres, et qui, dès le début, se préparait à aménager trois bâtiments scolaires pour les classes, plus un quatrième mis à la disposition des enfants dans la journée, aux heures creuses, pour étudier ou se recréer.

Des projets d'une telle ampleur doivent se baser sur une situation matérielle solidement établie. Il en est bien ainsi. En quinze jours, près de cinq cents familles ont demandé leur inscription, en offrant tous leurs biens. La majorité appartient à la C.N.T., une minorité à l'U.G.T., car presque partout des socialistes ou des membres de l'organisation syndicale réformiste n'ont pas respecté les directives données par leurs leaders. Et les adhérents seraient beaucoup plus nombreux si les organisateurs ne croyaient pas nécessaire d'observer une certaine prudence pour ne pas courir le risque d'être débordés, ou gênés, par des collectivistes encore incertains.

En adhérant, chaque nouveau membre remplit un formulaire où sont détaillés son identité, celle de sa famille et de ses parents à charge ; puis le capital actif qu'il apporte, ou son passif et ses dettes, en terre, en argent, en outils, en bêtes de trait.

La superficie totale des terres collectivisées, qu'elles soient prises aux fascistes, aux grands propriétaires, ou apportées par les adhérents, s'élève à 5.114 hectares, dont 2.421 irrigués et 2.693 de terres sèches. Quinze jours après l'inauguration officielle, le comité technique dirigeait le travail sur 446 hectares. Grâce à son initiative et à l'enthousiasme de tous, on avait déjà défriché 75 hectares de terre nouvellement livrés à la culture, qu'on avait ensuite ensemencés de blé, et de pommes de terre en prévision de la disette dont les villes étaient menacées.

Selon un plan général établi par les techniciens-praticiens, un quart des terres est réservé à la culture du riz, un quart aux orangeraies, la moitié à la culture maraîchère.

On a aussi décidé d'introduire l'élevage. En trois semaines, quatre cents moutons et chèvres (les fameuses chèvres de Murcie étaient à portée de la main), ont été commandés pour la reproduction. On espère ainsi pouvoir fournir bientôt à la ville entière la viande dont elle aura besoin, et dont les principales zones de production (Castille, Estrémadure, Galice) sont aux mains des forces franquistes.

Même initiative pour la volaille et pour les oeufs. Deux couveuses artificielles ont été achetées, qui ne constituent qu'un commencement. L'apiculture n'est qu'à l'état de projet, mais on y viendra vite dans cette région où les fleurs et les arbres fruitiers offrent tant de possibilités pour une activité jusqu'alors inexploitée. Enfin on va garnir de pins, dont le plant est déjà acheté, toute la partie de la sierra qui ne peut être travaillée par l'homme, et que l'érosion dénude de plus en plus.

En très peu de temps, la Collectivité s'est aussi procuré trois camions. Elle a entrepris de vastes travaux pour améliorer et étendre l'irrigation des terres sèches. En une semaine, des "acequias" ont été creusées, d'autres mises en chantier. Le plan adopté, et en voie de réalisation, consiste à élever l'eau au moyen de pompes motorisées jusqu'à un château d'eau d'où elle sera distribuée dans des terres qui, jusqu'à présent, étaient restées stériles parce que la petite propriété n'a ni l'initiative ni les ressources nécessaires pour de tels travaux (4).

Nous avons parlé d'économat, mot employé dans le Règlement. Les membres de la Collectivité y obtiendront, à prix coûtant, les produits disponibles dont ils auront besoin. Chacun pourra même demander ces produits en grandes quantités et en amortir le paiement sans intérêts, ainsi les ménagères n'auront pas besoin d'aller tous les jours, ou tous les deux jours, acheter du savon, du lard, de l'huile ou du charbon de bois.

Comme dans toutes les Collectivités, les bêtes de trait - ânes, chevaux, mulets - sont logées dans de vastes écuries spécialement aménagées, et employées selon les travaux lourds ou légers. Le matin, les garçons spécialisés attellent les charrettes et autres véhicules, ce qui diminue le travail des charretiers et des laboureurs. Le soir, lorsqu'ils rentrent, ces derniers n'ont plus à travailler encore une demi-heure ou plus, pour dételer les bêtes et leur donner les soins habituels avant de rentrer dans leur foyer. Leurs camarades s'en occupent. S'il y a beaucoup à décharger, d'autres compagnons accourent. Quelquefois ils sont trop nombreux et se gênent les uns les autres.

Moins de deux mois après la constitution de la Collectivité de Jativa, j'ai reçu de son secrétaire une lettre que je crois utile de reproduire intégralement. En voici le contenu textuel :

 

Jativa, le 8 mars 1937.

Au camarade Gaston Leval.

Cher Camarade,

J'ai attendu, pour te répondre, malgré ma promesse de le faire au plus tôt, parce que je désirais t'informer le mieux possible sur la marche de la Collectivité, et comme l'étude que je projette d'écrire me ferait tarder trop longtemps, j'ai décidé de t'envoyer les données absolument sûres dont je dispose, remettant à plus lard une information plus complète.

Le nombre de nos adhérents incorporés à la Collectivité s'élève à 408, dont 82 membres de l'U.G.T. et les autres de la C.N.T. Vingt-trois demandes d'admission attendent que la Commission nommée se prononce sur leur cas, les accepte ou les repousse. Les demandes d'adhésion sont très nombreuses, mais nous voulons avancer avec prudence.

L'élan des collectivistes est formidable, on travaille plus que jamais, si bien que les adhérents travaillent deux fois plus qu'avant. Aussi nous préférons freiner un peu quant à l'acceptation de nouveaux membres pour qu'ils ne soient pas guidés par le seul intérêt matériel, et que rien ne vienne nuire à l'esprit magnifique qui règne et est la garantie du succès.

Le total des salaires qui correspondent aux 408 familles adhérentes s'élève à 22.811 pesetas par semaine, dont nous devons déduire 1.108,50 pesetas que certains collectivistes gagnent au-dehors, dans d'autres professions (5), et qu'ils remettent à la Collectivité d'accord avec ce que le Règlement stipule à cet effet. Il faut ajouter d'autres dépenses, que nous calculons à l'année, telles que :

Pesetas
Médecins, opérations, dentistes, accouchements, oculistes, médicaments 26.600
Achats de meubles aux nouveaux ménages 9.250
Loyers des collectivités, 2.632 pesetas par mois, soit par semaine 607.40

Tout cela représente une somme hebdomadaire de 22.999,32 pesetas, qui divise par 453 personnes travaillant - nous retranchons naturellement les vieillards et les impotents - donne un salaire familial de 50,70 pesetas.

Nous n'avons pas encore pu faire nos calculs en ce qui concerne les achats d'engrais, de matériel de fumigation, de machines, d'aliments pour le bétail, et autres dépenses ; il en est de même pour nos recettes provenant de la vente de nos produits : nous sommes trop absorbés par les réunions avec les paysans qui n'ont pas voulu adhérer afin de décider à l'amiable quelles terres ils peuvent cultiver individuellement, et quelles terres ils peuvent nous céder.

Il y a continuellement du nouveau, aussi est-il impossible d'établir des comptes exacts tant que nous n'aurons pas terminé toutes ces tâches. Toutefois, la vie de la Collectivité est d'ores et déjà garantie. On peut, dès maintenant, faire en chiffres ronds le calcul suivant :

Pesetas
Valeur de la production de 340 hectares d'orangers, au prix minimum de 3.000 pesetas l'hectare1.020.000
Idem 100 hectares de rizières, moyenne 720 quintaux à 350 pesetas le quintal 252.000
Idem 280 ha de terres irriguées à une moyenne certainement supérieure à 6.000 pesetas1.680.000
Idem 1.000 ha de terres sèches à 300 pesetas (6)300.000
3.252.000

La différence entre les dépenses énumérées et les excédents bruts prévisibles est de 2.052.752 pesetas, qui nous permettront d'améliorer l'outillage, d'acheter des engrais, de nourrir du bétail, etc. Nous avons calculé au plus juste dans l'intention d'améliorer les conditions d'existence des membres de la Collectivité à mesure que nos réserves nous le permettront. Cela incitera les fermiers et les propriétaires jusqu'à présent hésitants à se décider. Les résultats obtenus les feront alors venir avec un meilleur esprit que s'ils venaient maintenant.

Depuis trois mois que notre Collectivité est fondée, nous avons acheté trois camions d'une valeur de 100.000 pesetas, nous avons aussi acheté douze mules et 230 chèvres (7). Nous attendons quarante vaches. Nous avons organisé un parc avicole et acheté six couveuses artificielles. Nos poules produisent actuellement 3.000 oeufs par mois. Nous avons décidé de développer au plus vite notre parc pour assurer gratuitement tous les produits de l'aviculture.

La production et l'apport monétaire de tous les collectivistes s'élèvent aujourd'hui à 400.000 pesetas par mois.

A toi fraternellement et à la cause qui nous est chère,

V. G.

 

Nous arrêtons ici la description en détail de la Collectivité de Jativa ; mais nous croyons utile de souligner une fois de plus la différence des conditions dans lesquelles sont nées les Collectivités d'Aragon et celles du Levant. En Aragon, il a été possible d'obtenir dès le début l'adhésion d'une plus grande proportion de la population par l'absence d'autorités républicaines s'y opposant, et de partis classiques, qui avaient disparu. Souvent la Collectivité s'est confondue avec le village. Dans le Levant, étant donné les circonstances, les Collectivités ont le plus souvent été partielles - la proportion de 40 % du total des habitants nous semble juste. Mais d'une part, le rayonnement de leur action, et d'autre part la plus grande densité démographique ont fait qu'elles aient été plus nombreuses, ont eu généralement plus d'adhérents, et que par l'abondance de leurs ressources, leur oeuvre constructive a été, dans le domaine économique, beaucoup plus importante. Sur le plan humain, l'Aragon n'a certainement pas été dépassé.


 

(1) Ce secrétaire, un tout jeune homme, me surprit par ses connaissances des problèmes de l'agriculture espagnole. Et pourtant, il était inconnu, même dans notre mouvement.

(2) Cette mesure fut prise pour les membres de la Collectivité non propriétaires de leur logement. C'étaient, comme on peut le voir, les moins nombreux. Il convient aussi de remarquer que les collectivistes habitaient chez eux, individuellement. Rien à voir donc avec les conceptions d'Etienne Cabet et d'autres réformateurs, dont les essais, en Amérique du Nord, échouèrent au siècle dernier, en grande partie par une communisation excessive et de tous les moments, qui étouffait la personnalité. Cette séparation fut pratiquée dans toutes les Collectivités espagnoles.

(3) Cette différence de moyens d'existence, que nous retrouvons ailleurs, mais pas toujours, choquera, avec raison. Il ne faut pas oublier que l'Espagne a conservé des séquelles de la permanence arabe, qui a duré huit siècles puis de l'Eglise catholique la plus arriérée qui fut. Telle est la première explication. Puis, dans la pratique, il est exceptionnel qu'une femme vive seule ; généralement, la célibataire, ou la veuve vit avec sa famille - les traditions familiales sont plus respectées en Espagne qu'en France. Le problème de la femme seule ne se pose donc pas comme les coutumes françaises peuvent le faire supposer. Ajoutons qu'autour de la table de famille, chacun, et naturellement chacune mange à sa faim. Il n'y avait de différence que dans les familles les plus pauvres où, souvent, si par exemple les ressources ne permettaient d'acheter qu'un seul oeuf, celui-ci était réservé au chef de famille, non tant parce que chef que parce que étant le seul à travailler, il lui fallait se nourrir suffisamment pour réparer ses forces et maintenir sa maisonnée.

(4) Cette initiative fut bientôt menée à bien. Quand l'eau jaillit et s'écoula pour la première fois vers les orangeraies, on craignit l'inondation. Il fallut dépêcher un jeune coureur à toute vitesse pour demander d'arrêter ce flot tumultueux et merveilleux.

(5) Cette partie de la lettre nous rappelle qu'il existait toujours un monde capitaliste, et que les Collectivités se développaient en concurrence avec lui.

(6) On voit ici la différence de rendement entre les terres sèches et les terres irriguées.

(7) Il n'est plus ici, question de moutons. Etait-ce oubli ?

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